Les Guerres de Spherus
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 [Le Labyrinthe][Event] Premier contact...

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Rehad
Tanika
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MessageSujet: Re: [Le Labyrinthe][Event] Premier contact...   [Le Labyrinthe][Event] Premier contact... - Page 2 EmptySam 11 Oct - 1:20

Le silence, posé tel un linceul de mutisme sur les guerriers présents, oppressait chacun d'eux dans un étouffant étau, une étreinte malsaine qui empêchait les esprits comme les corps de se mouvoir. La pression écrasait la chair aussi bien que l'âme, emprisonnant les puissants héros dans leur armure. Le moindre à-coup semblait pouvoir détruire la réalité elle-même, réduire l'existence à néant de manière définitive; s'ils l'avaient pu, ils auraient stoppé jusqu'à la course du temps. Cependant, ils devaient faire face aux faits, et accepter les événements qui venaient de renverser tant de vérités qui n'avaient jusque là jamais été démenties.

*Quel bâtard... nous faire ça, à un tel moment; et pire encore, nous ne pouvons même pas lui en vouloir, bien au contraire.*

Takurak lui aussi restait silencieux; son petit corps organique était complètement immobile, patientant, impatient à l'intérieur de son armure rahkshi perfectionnée. Son esprit, cependant, bouillonnait, virevoltait en tous sens. Le long de ses bras, de rapides flux élémentaires pulsaient à un rythme effréné, n'attendant que l'ordre de leur Maître pour déferler de manière chaotique et tout réduire en cendres fumantes. En face de lui, Epsilon restait debout, aussi mobile que les pierres du désert. Son visage, totalement lisse si on exceptait les quelques diodes luminescentes, ne pouvait exprimer une quelconque émotion. Seules les petites lumières changeaient de teinte, passant lentement du rouge bordeaux au jaune brillant, se rapprochant même parfois d'un vert vif - le même que celui qui ornait autrefois l'armure de Rohrak, l'un des héros disparus lors de la première Guerre Noire; celle qui aurait également dû être la dernière face au Grand Être déchu.

Autour de l'entité cybernétique, tels les piliers d'un temple millénaires, les Spectres Royaux avaient formé un cercle parfait; leurs armes braquées sur celui qui avait déjà mené plusieurs d'entre eux au combat, ils n'attendaient cependant que l'ordre du kraata pour détruire Epsilon - de nouveau. Immobiles et silencieux, ils étaient plus comparables à des machines qu'à de véritables êtres vivants; vétérans de dizaines milliers d'années de guerre, leur science du combat n'avait aucune égale dans l'univers matoran. L'expérience des meilleurs combattants de la planète des sables, alliée aux plus puissantes armes de l'Ultime Machine, avait ainsi mené à la création de Dieux de Guerre, des êtres qui ne vivaient que pour le conflit. Entourant ainsi leur frêle supérieur, ils semblaient plus imposants que d'habitude; pas le moindre cillement, pas le moindre tremblement ne trahissait ceux qui formaient autrefois la garde d'honneur du Seigneur Fantôme. Non, pas des machines; des statues, menées à la vie par un sortilège morbide qui leur aurait cependant ôté tout humanité ce faisant.

Le rahkshi brisa soudainement le silence gênant qui s'était installé, parlant d'une voix à la fois douce et ferme, prenant bien soin de peser chaque mot avant de le prononcer.


- Epsilon... je t'ai vu disparaître dans le ciel de Xia. A bord du vaisseau amiral de ceux qui ont attaqué notre foyer, tu as accepté de donner ta vie pour permettre notre victoire. Un jour que nous nous étions tous promis de ne pas oublier. Un jour gravé dans tous nos esprits, autant par la souffrance, les pertes subies, que par la gloire qui a ensuite rejailli sur les Prométhéens.

Je voudrais croire que Gladius t'a ramené parmi nous - ce serait formidable, un véritable miracle. Cependant... ceci paraît tout simplement impossible. Je veux juste savoir, Epsilon. Comment cela est-il possible ?

Epsilon resta immobile, tandis que sa voix artificielle résonnait dans les airs autour de lui. Les diodes de son visage virèrent au bleu nuit, puis au rouge sang avant de s'éclaircir peu à peu, jusqu'à devenir complètement blanches.

- Mon ami... je me souviens parfaitement, jusqu'au moindre détail. Notre entrée dans le ventre de la bête. Notre périple à travers ses étroits méandres, nos rencontre avec chacun de nos ennemis. Nous avions pénétré au cœur du corps de la créature, il ne nous restait plus qu'à la détruire de l'intérieur. Tout autour de moi, je pouvais sentir la formidable puissance qui alimentait la moindre parcelle de ce mastodonte d'acier. Tant d'énergie, concentrée en un même lieu. Le potentiel de destruction de ce Béhémoth était bien supérieur à tout ce que nous avions déjà connu, Takurak. S'il l'avait voulu, notre ennemi aurait tout simplement rasé Xia d'un seul tir. Je ne comprenais pas pourquoi il attendait, et je comptais profiter de cette faiblesse.

Tout s'est passé très vite, ensuite; notre arrivée dans la salle du Coeur. Ma décision. Votre fuite. Mais, alors que j'enclenchais l'explosion finale...

Tout se figea. Les projectiles tirés par les drones ennemis. Le son craché par leurs multiples armes. Le crépitement des réacteurs à fusion. Le doux vrombissement du vaisseau. L'énergie qui fluctuait en permanence à travers ses flancs; le temps semblait s'être arrêté, et je ne pouvais pas non plus bouger - tandis que mes sens continuaient, eux, à fonctionner parfaitement. Je restais ainsi, suspendu à travers le cours des événements, observateur totalement impuissant. C'est alors qu'il apparut devant moi, sans le moindre signe; l'instant précédent, il n'existait pas. Et dès lors qu'il entra dans mon champ de vision, c'est comme s'il avait toujours été présent à nos côtés - bien que cela semble être impossible. Il ne bougea pas, restant immobile un instant - combien de temps exactement, je ne saurais le dire. Mais cela fut amplement suffisant pour que sa seule présence imprime durablement nombre d'informations qui resteront à jamais gravées dans ma mémoire.

Il était venu me chercher, m'empêcher de disparaître, pour me permettre de te retrouver, aujourd'hui même. Gladius ne m'a pas ramené d'entre les morts; il a tout simplement empêché ma destruction. Cependant, il reste encore un détail à élucider; dans ma mémoire, j'ai également d'autres souvenirs, qui tendent à disparaître très rapidement. Des souvenirs, dans lesquels j'enclenche bel et bien la destruction du vaisseau, et où mon corps se désintègre complètement juste avant que ma conscience ne disparaisse. Ces souvenirs, ils sont bien réels, je ne les ai pas inventés.

Ton père, notre chef; je le soupçonne d'avoir tout simplement remonté le cours du temps pour en modifier le cours de façon définitive. Il a annulé ma mort, sans la moindre difficulté. Avant de m'envoyer ici, il m'a tout expliqué, puis a disparu aussi rapidement qu'il était arrivé. Ce qui me sidère cependant, est qu'il aurait pu faire bien plus. Remonter plus loin en amont, changer le déroulement des événements bien plus tôt que cela. Empêcher la défaite des Fantômes, tuer Tuma, mener les rebelles à la conquête de l'univers matoran. Personne n'aurait pu l'en empêcher. Les Puissants auraient été écrasés en quelques heures, tout au plus. Mais il a choisi un autre embranchement du temps, dans lequel tu as été créé, tu as survécu, tu as réussi à t'entourer d'alliés là où les autres kraatas étaient destinés à une vie de servitude. Il a sacrifié sa propre existence au profit de la tienne, Takurak. Et... il m'a demandé de te transmettre quelque chose.

Le rahkshi déglutit bruyamment, puis inspira fortement avant de soupirer, tentant de rétablir le calme dans son esprit - sans succès. C'est alors qu'une voix, autrement plus puissante que celle d'Epsilon, retentit alors autour de tous les êtres présents. Ferme, empreinte d'une sagesse infinie mais teintée de douceur, elle semblait provenir d'un passé révolu, tout en évoquant un futur à la fois proche et lointain. Les mots qui résonnèrent alors s'imprimèrent comme au fer rouge dans l'esprit de ceux qui purent l'entendre. L'entité, cybernétique, quant à elle, se voyait soudainement entourée d'une aura blanche-bleutée extrêmement brillante, un ouragan miniature de lumière qui déferlait autour de lui dans le silence le plus complet.

- Il s'agit là d'un présent que je t'offre, Takurak. La chance que je n'ai pas eu, celle de pouvoir revoir mes proches disparus; prends-en bien soins, car il s'agit là du cadeau le plus précieux que je puisse te faire; à défaut d'être un bon père, j'aurai au moins pu t'apporter ce réconfort certain dans ta jeune existence. Il ne s'agit cependant pas d'un adieu, mon fils. Nous nous reverrons, je t'en fais la promesse. D'ici là, j'ai une autre mission à te confier, malheureusement très ardue. Tu dois retrouver un être qui a comme moi tout sacrifié pour le bien de son peuple. Un être qui comme moi a quitté son corps d'origine pour rejoindre un état transcendant la simple définition du vivant. Un être que l'on croyait perdu, mais qui attend, patiemment, que l'on vienne le débusquer. Un être de lumière autrefois pur, désormais souillé par les ombres. Trouve-le, et rappelle-lui sa Destinée.

La lumière disparut, tandis que Takurak déplissait ses yeux pour se réhabituer à la pénombre environnante. Le rahkshi marcha ensuite en direction de l'entité cybernétique, puis s'immobilisa à quelques dizaines de centimètres de ce dernier, patientant dans le silence le plus complet. Lorsque sa voix brisa de nouveau le silence qui s'était soudainement abattu, les mots résonnèrent pendant plusieurs secondes dans les airs.

- Spectres, à mon ordre...

Les colosses de métal bougèrent enfin, se plaçant en position de tir, prêts à faire feu sur Epsilon sans la moindre hésitation. Le léger mouvement des armes et des articulations métalliques causa un bruit qui contrasta de façon étrange avec la voix chaleureuse de Takurak qui retentit alors.

- Saluez Epsilon, qui est enfin de retour parmi nous.
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MessageSujet: Re: [Le Labyrinthe][Event] Premier contact...   [Le Labyrinthe][Event] Premier contact... - Page 2 EmptyMer 24 Déc - 2:31

[HTP] Ce message est chronologiquement révolu, datant d'avant la fuite du dernier ordre, juste après le post précédent de ce topic. [/HRP]

- Wrifaën...

L'intéressé ne répondit pas, laissant entrer le messager. Un glatorian, grand et robuste; mais cela, il le savait bien avant que le guerrier ne vienne le chercher. Beaucoup trop bruyant, pataud, comme tous ses congénères. Seul le grand nombre leur apporte une quelconque utilité. De la chair à canon; voilà ce qu'ils étaient. Des porcs, envoyés à l'abattoir pour nourrir l'effort de guerre.

- Wrifaën ?

Et stupide, qui plus est; croire qu'un makuta avait besoin de se voir répéter quoi que ce soit pour qu'il puisse le percevoir, le comprendre et l'assimiler immédiatement. Ces singes manquaient grandement d'éducation.

- Je ne suis pas sourd... soldat.

- Frère-Long Artilleur Leyric; le Seigneur-Commandant Takurak m'envoie vous chercher. Il a une mission à vous confier.

Une mission; intéressant. Toujours plus que les légions robotisées envoyées par le Maître. Le makuta n'avait ressenti excitation, aucun contentement lorsque son énorme masse d'armes avait broyé les drones du Protectorat. Le seul instant plus intéressant que les autres fut la découverte de la nouvelle version de ces soldats de plomb. Améliorés, renforcés, il représentaient alors une menace accrue contre les sacs à viande de Bara-Magna; aucune par contre, face à un Créateur Noir ancestral comme Wrifaën. Mais désormais, le makuta cherchait autre chose qu'une vie de servitude. Il voulait passer de l'autre côté du miroir, et détenir entre ses mains ce qu'il désirait tant.

Mais tout d'abord, il devait obtenir des Prométhéens le moyen d'atteindre celui qui lui bloquait la route. Et pour cela, il avait déjà rempli sa part du marché, aider l'infanterie de Takurak à tenir la ligne défensive face au Protectorat; une mission bien trop simple, mais Wrifaën n'allait pas se plaindre de la facilité avec laquelle il avait fauché tant de drones de ses bras puissants, empalé nombre d'entre eux sur les piques proéminents de sa masse d'arme, écrasé certains même de sa seule poigne métallique. Pas une fois, il ne s'était servi des Ténèbres; Il ne réservait cet honneur qu'aux cibles de valeur.

L'air se tordit sans un bruit autour du makuta, qui disparut immédiatement; pas le moindre mouvement d'air, pas même le plus petit crissement de sable. Une dématérialisation discrète, instantanée et précise. Avant même de réapparaître, juste derrière la porte blindée d'un véhicule de transport lourd, Wrifaën savait où il se trouvait. Il sentait l'énergie de l'air, emplie d'innombrables humeurs, la plupart désagréables. Glatorians, agoris, skralls, vorox; toas, steltians, vortixx, matorans, skakdis, zyglaks; même - bien plus ténues cependant - celle des makutas, parfaitement reconnaissable dans ce désert stérile. Et bien d'autres espèces, toutes différentes et pourtant ressemblantes par bien des aspects.

Cependant, autre chose détourna rapidement le Créateur de l'odeur pestilentielle des vivants.

Takurak. Aqua. Epsilon. Deux titans étaient également présents dans le véhicule, dont les parois étaient complètement insonorisées. Un rahkshi de Silence utilisait également ses pouvoirs pour empêcher quiconque de comprendre ce qui se disait à l'intérieur de la cavité; une sécurité qui aurait amplement suffi pour la quasi-totalité des êtres présents. Cependant, cela n'empêcherait pas Wrifaën de se procurer là quelques informations, très intéressantes.

Le makuta n'eut pas besoin de fermer les yeux, se contentant de rester parfaitement droit, à quelques mètres du transport lourd. Immédiatement, son esprit quitta - en partie - son corps. Tandis que derrière lui, dans l'armure de protoacier, seule une ébauche spirituelle restait, attendant le retour de son complémentaire. Le Créateur noir sentait le monde différemment, sous cette forme. Tout était flou, lent, presque inexistant. La matière elle-même paraissait avoir perdue toute sa substance. Le temps s'écoulait de façon étrange, fluctuant. Malléable.

Wrifaën, sans pourtant effectuer le moindre geste, se déplaça en direction du véhicule de transport. Glissant au-dessus du sol, une fois de plus en silence, le makuta traversa le métal et les couches de protections cinétiques, magnétiques et thermiques. Bientôt, il se retrouva juste derrière Aqua, qui était adossée à la paroi interne du véhicule blindé. Le Créateur ralentit sa course fantomatique, puis s'arrêta complètement en ne laissant dépasser du mur spectral que son visage.

La conversation était apparemment tendue, lente... importante donc. Les mots résonnaient longuement dans cette facette de la réalité, doux et déformés de manière étrange, comme si l'écho se refusait à disparaître, luttant de tout son possible pour persister quelques secondes de plus; en vain, car il ne s'agissait en fait que d'une illusion: les mots ne duraient pas plus longtemps. Seul leur impact physique, en tant que vibration de l'air, pouvait être perçu plus longtemps, car les compressions et décompressions du gaz étaient parfaitement discernables pour celui qui avait longuement étudié les effets d'une projection spectrale si poussée.

Wrifaën avait l'impression d'avoir pénétré dans l'enceinte du véhicule depuis plusieurs minutes; et cependant, le son des paroles portées par les guerriers présents n'eurent fini de se propager qu'à cet instant, lui permettant de discerner sans problème le moindre détail - même involontaire. Ce fut la voix d'Aqua, plus proche de lui, qui résonna la première.


- En es-tu bien sûr, Epsilon ? Cela pourrait être une réelle catastrophe, bien au-delà de nos pires craintes. Il faut prévenir les autres factions !

Takurak ne laissa pas son allié répondre; ses traits renfrognés trahissaient une tension interne bien palpable: une colère sourde et un profond mépris bien cachés cependant, qui ne transparurent qu'à peine lorsque le rahkshi prit la parole.

- A quoi bon ? Nous ne pouvons pas compter sur une action efficace de leur part. L'Ordre est déjà embourbé jusqu'au coup dans cette guerre. L'Empire n'est qu'un ramassis de barbares sanguinaires inefficaces. Le courage de leurs chefs n'est plus à prouver, mais cela est très loin d'être suffisant. Et la Confrérie... les makutas ne sont pas dignes de confiances. Des créatures cupides, aussi corrompues qu'avides de pouvoir, n’œuvrant que pour leur bénéfice personnel. Nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes.

Il ne s'agit pour l'instant que d'une hypothèse. Mais tout de même... s'il s'agit de la vérité, je ne vois pas le moindre espoir de pouvoir vaincre le Protectorat désormais.

L'un des titans sortit un petit dispositif, qu'il laissa tomber au sol. L'appareil se déplia au bout d'une demi-seconde, révélant quatre projecteurs miniaturisés qui commencèrent à luire doucement; bientôt, leurs faisceaux se croisèrent, faisant apparaître un hologramme complexe. Des archives, récupérées en partie à Onu-metru, mais également dans les dédales obscurs de Xia. Les données défilaient à un rythme anarchique, mais ne tardèrent pas à se stabiliser.

Une image apparut alors; un spectacle connu désormais, car retransmis de nombreuses fois dans l'univers matoran et au-delà. Karda-Nui, avant que les Puissants ne parviennent à mettre un terme aux agissement du Protectorat; du moins l'avaient-ils cru. Le Poing de l'Ombre gisait au sol, carcasse fumante, tandis que des milliers de drones avaient été démantelés à même le sol - par des armes à énergie ou bien solides.

Puis l'image s'anima, reculant très rapidement jusqu'à arriver au moment exact où les dernières forces de l'univers matoran libre étaient entrées dans le Cœur de l'univers. Les croiseurs de l'Alliance Criminelle, de l'Empire Makuta et de la Triade du Grand Esprit, gigantesques béhémoths de verre et d'acier, qui faisaient déferler la mort de leurs innombrables canons. Un concert de feu, une danse de métal, une chorale industrielle parfois accompagnée du cri des guerriers qui mourraient en nombre pour permettre à leurs camarades de retenir le Protectorat - et au final, laisser le champ ouvert au Hagah qui se sacrifia au nom de l'univers matoran, et de tous ses habitants.

En vain...

Wrifaën n'avait pas personnellement pris part à la bataille, mais il avait déjà étudié nombre d'holos sur ce sujet. La plupart mettaient l'accent sur le sacrifice héroïque, et les terribles pertes subies ce jour là; d'autres en revanche, apportaient un discours plus mitigé, surtout depuis le retour du Protectorat. Toute ces pertes, vivantes et matérielles... avaient-elles été utiles, au final ? Ou bien, avaient-elles seulement permis de gagner quelques mois de répit ?


- Reprends depuis le début Epsilon, étape par étape... un détail nous a forcément échappé.

Takurak semblait bien plus tendu qu'à son habitude. Le makuta pouvait sentir l'esprit de ce dernier, en proie à d'intenses troubles internes, comme une boule de colère, de frustration mais également d'espoir, qui n'attendait que d'exploser. Le guerrier artificiel acquiesça, puis reprit la parole, pesant chaque mot comme si sa vie en dépendait, et articulant soigneusement la moindre des syllabes digitalisées qu'émettaient ses processeurs vocaux.

- Tout cela m'est apparu comme un flash soudain, lorsque Gladius m'a sauvé pour m'amener en ces lieux. Utilisant son pouvoir sur moi, j'ai reçu un... "débordement", de ce qui pourrait être appelé son aura. Un champ d'énergie quantifiable qui l'entourait, et donc une infime partie s'est imprégnée en moi. Des données, en fait, codées grâce à un cryptage extrêmement poussé.

Jusqu'à maintenant, je pensais qu'il s'agissait juste d'une erreur de la part du Seigneur Fantôme, d'une inattention de sa part. Cependant, lorsque j'ai réussi à décoder les informations qu'il m'avait confiées, j'ai immédiatement compris qu'il s'agissait d'un acte tout à fait intentionnel, et non pas un accident. Les données codaient des coordonnées, des dates, des nombres; des événements en fait, tous liés à la Guerre Noire.

Le premier est celui qui s'affiche devant nous; l'arrivée des forces unies à Karda-Nui. Les nombres qui accompagnent cet événement sont plutôt simplistes; il s'agit de statistiques, des probabilités on ne peut moins complexes. Au final, quand on ramène les lignes de code à un seul résultat, on obtient ce qui suit.

Au-dessus de l'hologramme de la bataille, une ellipse apparut à la verticale; un ovale plutôt allongé, ressemblant à l'orbite d'un corps céleste autour d'un autre, plus massif. Devant l'air interrogateur des autres guerriers, l'entité cybernétique prit la parole.

- Un zéro, absolu. Un néant total... qui correspond aux chances de victoire des Puissants lors de cette ultime bataille. Est-ce qu'il s'agit là de la vérité, ou bien d'une erreur de la part de Gladius, il faudrait le revoir pour en avoir le coeur net; cependant, au vu de sa situation, je ne pense pas qu'il se soit trompé, ni qu'il revienne nous voir d'ici peu. Mais si nous lui faisons confiance - ce qui est mon cas - nous sommes alors en droit de se poser quelques questions. Si le Maître avait la capacité d'anéantir toute l'armada alliée d'une seule salve du Poing de l'Ombre et des croiseurs Séides, pourquoi n'en a-t-il rien fait ? Pourquoi a-t-il laissé les Puissants attirer son attention ? Et surtout, pourquoi a-t-il intentionnellement laissé ses ennemis abattre le Poing de l'Ombre ?

Le silence se maintint dans la salle, attendant qu'Epsilon continue son monologue.

- D'autres données sont présentes; liées à d'autres événements liés à une stèle et à un mystérieux voyageur, mais sans informations quantifiables cette fois-ci. Seulement des fragments de code incomplet qui me demanderaient un temps fou si je voulais en tirer quoi que ce soit, à moins que quelqu'un ne nous vienne en aide.

Mais la donnée la plus intéressante est la suivante.

L'hologramme vacilla avant de s'éteindre pendant quelques instants; l'émetteur clignota rouge, une, deux, trois fois, puis émit à nouveau une image très nette, mais infiniment plus complexe que l'ancienne. Un réseau énergétique, à la puissance phénoménale, dépassant des millions de fois tout ce à quoi les Prométhéens auraient jamais pu avoir accès. Une force gigantesque, dépassant même les limites de l'imagination. La vitalité nécessaire, au fonctionnement d'un univers tout entier. En dessous du réseau, qui était limité par une paroi tangible à forme vaguement humanoïde, une profonde couche de sédiments très variables, parfois droits et cristallisés, parfois tordus, vitrifiés et brisés de toutes parts.

- Mata-Nui - ou du moins, une version extrêmement simplifiée - posé sur les montagnes quartziques blanches. Gladius a d'ailleurs laissé un message, également codé, que j'ai fini de décrypté il y a quelques heures de cela. Et... il semble corroborer mes hypothèses.

"Cherchez le contrôle / Un Dieu aurait-il agi ainsi ? / Les racines du mal / Les fruits empoisonnés de la souffrance."

Les phrases s'affichèrent d'elles-mêmes, fantomatiques, tremblant dans les airs comme si la moindre perturbation risquait de les faire voler en éclat et disparaître à jamais dans les ténèbres. L'émetteur peinait à retranscrire toutes les données simultanément, si bien que Takurak fit disparaître le schéma de l'univers matoran, ne laissant que les mots éthérés, flottant comme par magie au-dessus du sol. Sous chacune des phrases, une image dépourvue de toute profondeur apparut rapidement, crépitant pendant quelques secondes avant de se stabiliser.

"Cherchez le contrôle" était ainsi souligné d'une image très sombre, presque entièrement noire; dans les ténèbres cependant, deux puissantes lueurs brillaient entre les ombres. Les yeux de Mata-Nui, habituellement pleins de vie, miroitant d'un jaune vif, apparaissaient cependant rouge vifs, presque bordeaux; malades, d'un mal bien plus insidieux que ceux qui s'attaquaient à la chair. Non, ce regard là était touché par une folie profonde, terrible, pleine de haine, mais surtout avide. Une avidité sans bornes, qui ne pouvait plus être comblée. L'avidité de celui qui avait déjà tout obtenu - et qui paradoxalement, voulait toujours plus de pouvoir. Toujours de plus de force. Toujours plus de contrôle.

"Un Dieu aurait-il agi ainsi ?", quant à lui, était accompagné de Mata-Nui, se posant sur Bara-Magna, alors qu'il n'était toujours pas assis sur les montagnes quartziques blanches. Ses yeux, cependant... ils étaient de rouge, du même que celui vu précédemment. Sombre, belliqueux, haineux et fou tout à la fois.

"Les racines du mal" étaient illustrées par une image composée de trois parties, qui fusionnaient les unes avec les autres en un habile dégradé qui donnait l'impression qu'il ne s'agissait que d'une seule photo - même s'il était clair que les trois environnements évoqués n'avaient rien à voir les un avec les autres. Le premier était une stèle, dont la surface semblait comporter des gravures; le monolithe avait été placée dans un paysage désolé, dur et presque dénué de vie. La deuxième image montrait un corps allongé au sol; un voyageur apparemment, peut-être un messager. Son visage était marqué par une peur sans nom - feinte ou réelle ? - et il semblait avoir du mal à se déplacer. Il était proche d'un matoran apeuré, auquel il s'adressait sûrement. Enfin, dans le ciel, au-loin, des vaisseaux explosaient tous de concert; des silhouettes facilement reconnaissables: il s'agissait là des croiseurs envoyés par les puissants à Karda-Nui.

"Les fruits empoisonnés de la souffrance"; cette phrase fut soulignée d'une montagne de cadavres, des guerriers et des civils fraîchement tués. Parmi eux, des visages connus du grand public, de grands guerriers qui avaient lourdement pesé dans la balance lors de la Guerre des Puissants: Steelerak, Lord Darkness, Rouage, Rohrak, Zevan, Eminax, Gardien, Tericarax, The Ice Master, Lebog... et bien d'autres. Ils étaient très nombreux à avoir péri; bien trop nombreux.

Ce fut à cet instant précis que tout s'agença dans l'esprit de Wrifaën; ce fut exactement au même moment que Takurak, lui aussi, comprit à quel point ils avaient tous été bernés. A quel point ils n'étaient rien de plus que des imbéciles, qui couraient pour échapper à un incendie, fonçant sans le savoir droit vers une falaise et s'apprêtant à s'écraser des centaines de mètres en contrebas.


- Si le Maître n'a pas détruit les Puissants dès leur arrivée à Karda-Nui, c'est qu'il estimait leur action... "utile". S'il les a laissé détruire le Poing de l'Ombre, c'est qu'il le désirait, rien de plus - et donc, forcément, qu'il n'était pas à son bord lorsque le monstrueux vaisseau a explosé.

Il voulait que les Puissants conservent un espoir de victoire. Lorsqu'ils sont entrés dans le Cœur de l'univers; lorsqu'ils ont laissé entrer le Hagah dans le Codrex; peut-être même depuis le début, lorsque des messages d'avertissement leur furent envoyés. Des cadeaux empoisonnés... un piège, dans lequel les factions se sont jetées la tête la première.

Au final, il ne désirait qu'une chose. Il détenait déjà tout le pouvoir dont il pourrait rêver. Des richesses inégalables, des technologies tellement avancées qu'elles nous sembleraient presque magiques. Sous sa coupe, les armées les plus nombreuses et les guerriers les plus puissants ploient le genou. Il ne lui manquait plus que... le contrôle. Un contrôle absolu, sur un univers entier - voire au-delà.

Si j'ai raison... notre situation est plus que désespérée. Nous sommes d'ores et déjà condamnés. Mais il reste un espoir. J'espère, oh, de tout mon cœur, que j'ai tort. Que les pièces peuvent s'agencer d'une autre manière, résoudre ce puzzle d'une façon toute à fait différente. Nous devons en être sûr. Lorsque les membres du Dernier Ordre reviendront du labyrinthe, je dois m'entretenir de toute urgence avec Tanika ou Shrecki.

Aqua et Epsilon voulurent parler, mais Takurak ouvrit une porte dimensionnelle directement sous ses pieds, et disparut.

Wrifaën, quant à lui, se retira lentement, jusqu'à retrouver son corps. Intéressant... tout cela était même, presque captivant. Une information d'importance capitale.

Le makuta se téléporta loin du camp, abandonnant là les Prométhéens.

Aqua soupira, angoissée:


*La mission de Gladius semble avoir été... reportée.*
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